Correct the map : la campagne qui interpelle sur l’image faussée de l’Afrique sur nos cartes
Depuis plusieurs semaines, la pétition internationale « Correct the Map » fait parler d’elle à l’échelle mondiale. En ligne de mire : une représentation cartographique vieille de plusieurs siècles, la projection de Mercator, dont les déformations massives continuent d’alimenter une vision biaisée de la planète et des continents. Au cœur de ce mouvement, la volonté de rétablir la taille réelle de l’Afrique, souvent réduite ou minimisée sur les atlas utilisés en classe comme dans les médias.
D’où vient le problème de la carte du monde actuelle ?
Le débat autour de la projection de Mercator ne date pas d’hier. Popularisée dès le XVIe siècle pour faciliter la navigation maritime, cette méthode de cartographie présente un compromis pratique mais entraîne aussi de profondes distorsions. Les régions proches de l’équateur apparaissent écrasées tandis que celles situées plus au nord ou au sud prennent des dimensions considérablement exagérées.

Ce phénomène est particulièrement frappant lorsqu’on compare la taille de certains territoires. Par exemple, le Groenland semble rivaliser avec l’Afrique, alors qu’en réalité, le continent africain est quatorze fois plus vaste. Ces déformations sont devenues familières ; elles influencent pourtant notre perception des rapports de force entre continents depuis des générations.
Quels sont les objectifs de « Correct the Map » ?
La campagne de sensibilisation « Correct the Map » ambitionne d’alerter le public et les institutions sur ces représentations erronées. Portée principalement par deux organisations africaines de plaidoyer, elle souhaite mettre fin à une perception héritée de traditions européennes et coloniales, qui sous-estiment visuellement le rôle géographique et stratégique du continent africain.
En proposant d’adopter des projections plus fidèles aux proportions réelles, l’initiative espère corriger l’injustice cartographique perpétuée dans l’éducation, la presse et les outils numériques. L’Union africaine a récemment exprimé officiellement son soutien à cette démarche, offrant ainsi à la campagne une visibilité accrue sur la scène internationale sur la carte de l’Afrique.

Pourquoi l’Afrique est-elle particulièrement concernée ?
L’Afrique occupe une place centrale dans cette mobilisation car elle figure parmi les principales victimes de la mésestimation sur la projection de Mercator. Sur ce type de carte, l’Europe et l’Amérique du Nord se retrouvent artificiellement grandies, alors que l’Afrique paraît amoindrie malgré sa superficie impressionnante. Or, de nombreux élèves, étudiants et même adultes intègrent inconsciemment ce rapport de taille tronqué dans leur compréhension du monde.
Rétablir la taille réelle de l’Afrique redonne aussi une voix et une visibilité à un continent souvent relégué à l’arrière-plan du récit mondial. Pour beaucoup de signataires, il s’agit d’un enjeu symbolique autant que pédagogique.
Que proposent concrètement les défenseurs d’une nouvelle carte ?
Remplacer purement et simplement la projection de Mercator reste difficile, tant celle-ci imprègne les formats standards dans l’imagerie collective et les outils de navigation. Les promoteurs de « Correct the Map » invitent néanmoins à utiliser d’autres approches, comme la projection Gall-Peters ou la projection Equal Earth, qui tentent chacune de restituer des surfaces plus conformes à la réalité physique.

Le changement principal proposé consiste à intégrer davantage ces alternatives dans les manuels scolaires, plateformes pédagogiques et médias d’information. Une telle évolution permettrait de diversifier les points de vue, tout en encourageant une réflexion critique sur les choix techniques derrière chaque représentation cartographique.
Les relais internationaux et l’implication institutionnelle
L’impact de la campagne de sensibilisation a connu un tournant lorsque des personnalités publiques, tel que Rima Hassan, ont pris position publiquement pour appuyer la demande de réajustement cartographique. Ces soutiens médiatisés ont permis de porter la discussion hors du cercle académique, atteignant un public beaucoup plus large.
Parallèlement, l’Union africaine, organisation régionale majeure, a décidé d’apporter un soutien officiel à la campagne en août 2025. Une manière de souligner l’importance politique et symbolique de la question, mais aussi de rappeler que la cartographie joue un rôle central dans la représentation des puissances mondiales.
Quelles actions concrètes ont déjà été lancées ?
En plus de la pétition internationale ayant recueilli un nombre croissant de signatures, plusieurs ateliers et conférences éducatives ont été organisés sur le continent africain et à l’étranger. L’objectif est de proposer aux enseignants et décideurs des ressources permettant de mieux comprendre l’origine des écarts actuels ainsi que les solutions existantes.
De nombreuses associations éducatives plaident également pour l’ajout de moyens pédagogiques adaptés : mises à disposition de cartes alternatives, campagnes de sensibilisation auprès des médias et création de contenus numériques illustrant différentes projections. La liste des propositions avance progressivement, portée par un dialogue élargi entre experts et utilisateurs finaux.
Exemples de conséquences concrètes
Les distorsions véhiculées par les anciennes projections n’ont pas qu’un impact théorique. Selon des données mises en avant lors des événements liés à « Correct the Map », elles influencent aussi la façon dont différents pays sont mis en avant sur le plan économique ou géopolitique. Une carte où certaines régions semblent disproportionnées peut orienter les décisions d’investissement ou générer des malentendus stratégiques.
Corriger ces anomalies visuelles contribuerait donc à établir une base plus saine et fidèle pour analyser la dynamique réelle entre les continents. Cela concerne aussi bien la coopération internationale que l’enseignement des relations internationales ou l’élaboration des politiques publiques.
Comment engager le changement dans la représentation du monde ?
La transition vers une carte du monde plus équitable implique plusieurs étapes. D’abord, une remise en question collective des outils communément utilisés. Ensuite, l’engagement concret des acteurs institutionnels, qu’ils soient éducateurs, éditeurs ou responsables gouvernementaux, pour renouveler leurs supports pédagogiques et informatifs.
- Mettre à jour les curricula scolaires afin d’intégrer d’autres modèles de projection ;
- Sensibiliser les professionnels des médias à l’utilisation de cartes fidèles aux superficies ;
- Encourager le débat public et scientifique sur les enjeux associés aux choix cartographiques ;
- Soutenir la création de ressources accessibles montrant la diversité des représentations possibles.
Des industriels aux ONG, en passant par les universités, chacun peut s’emparer de cet élan pour participer à la diffusion de connaissances correctes sur la taille réelle des continents. Cette dynamique vise à renforcer la culture générale autour de la représentation cartographique, tout en déconstruisant les idées préconçues sur la hiérarchie entre territoires, en faveur de plus de justice et dignité.